Les recommandations du club des irresistibles - L.Dujol. CC-BY-SA

J’ai la chance d’effectuer un stage en immersion dans le réseau des bibliothèques publiques de Montréal. Des rencontres, des lieux, des notes … et un carnet, rue Milton.

C’est sous une pluie fine et une température clémente pour la saison que je marche à travers le quartier résidentiel d’Outremont où j’ai rendez-vous avec Marie Anne Poggi à la bibliothèque Robert Bourassa.

Marie Anne Poggi est animatrice de clubs de lecture au sein des bibliothèques de la grande région métropolitaine de Montréal depuis près de 30 ans. Elle y anime une vingtaine de clubs de lecture. Marie Anne est une passionnée comme rarement j’en ai croisé. Elle vous parle de son métier d’animatrice avec une telle conviction que l’on abandonne vite son clavier pour l’écouter parler d’un club plus particulier, celui des Irrésistibles.

Créé en juin 2007, le club des Irrésistibles est constitué de lectrices et de lecteurs désireux de faire connaitre leurs coups de coeur ou leurs coups de gueule en écrivant des critiques de livres, de films ou encore de pièces de théâtre. La première originalité de ce club est qu’il est ouvert à tous. Il n’est pas nécessaire d’être abonné à une bibliothèque, ni d’être montréalais, il suffit juste de vouloir partager ses lectures et de se déclarer comme membre du club en s’inscrivant sur le site dédié ou via un club de lecture animé par Marie Anne. Ils sont à ce jour plus de 600, certains provenant d’ Europe, d’Australie ou d’Amérique du sud.

Une scénographie spécifique - Par L.Dujol. CC-BY-SA

La force de ce club est l’animation de la communauté effectuée par Marie Anne. Celle ci suggère, accompagne, encourage et relance sans cesse les lecteurs. Mais surtout elle valorise les productions de sa communauté. Chaque semaine une infolettre est publiée offrant les nouvelles suggestions de la semaine. Ces mêmes suggestions sont visibles sur le site du club qui offre un accès aux critiques par genre. Le meilleur de ses critiques est lu lors d’une émission radiophonique hebdomadaire sur une radio locale de Montréal. Il est possible d’écouter l’émission en direct via leur site web tous les samedis de 18h30 à 19h, heure française. Le podcast arrive bientôt. Les supports tangibles de médiation ne sont pas oubliés. Un logo « 100% certifié irrésistibles » est apposé sur la couverture de tous les documents suggérés et sont ensuite mis en valeur par une scénographie spécifiques dans les murs de la bibliothèque Robert Bourassa. Ce logo est devenu un « label qualité » de recommandation apprécié par les abonnés qui empruntent et réservent très largement ces documents. Au final une valorisation sur des supports physiques, radiophoniques et numériques. Un bel exemple de médiation globale des collections organisée en écosystème.

Ce travail de médiation cible toute les communautés que peut toucher une bibliothèque. La communautés des abonnés, la communauté des habitants de l’agglomération montréalaise, la communauté de pratique des bibliothécaires et la communautés d’intérêt des amateurs de lecture qui s’activent sur le web. S’y ajoute la force de l’animation de Marie Anne, qui fait la passerelle entre ces sphères physiques et numériques et apporte l’indispensable valeur ajoutée humaine à cette communauté. Une bibliothèque au cœur de toutes les communautés et à la croisée de tous les espaces documentaires qu’ils soient physiques et numériques.

Depuis 2009, le club des irrésistibles désigne une œuvre qui se mérite le prix annuel des lectrices et lecteurs du club. Cette œuvre est choisie par un jury constitué de membres du club, à partir des cinq titres les plus souvent suggérés durant l’année. Un moment fort dans la vie de cette communauté. Ces livres ne sont pas nécessairement des parutions récentes et concernent tous les genres littéraires. Il n’est pas nécessaire n’ont plus que ces livres soient disponibles dans le catalogue de la bibliothèque. D’ailleurs les suggestions les plus populaires peuvent être aussi des suggestions d’achat qu’essaient de suivre les bibliothécaires acquéreurs. Une communauté d’amateur à l’initiative des acquisitions des professionnels. Encore une belle initiative.

Un regret néanmoins. Les suggestions ne sont pas signées. La mention “membre de – le lieu où vit l’auteur », figure au bas de la critique. Dommage de ne pas donner au moins le prénom de l’auteur de la suggestion suivi de son statut, simple lecteur, abonné ou encore bibliothécaire. La valorisation des contenus est essentielle, mais celle de l’expertise professionnelle et amateur l’est aussi.

14 commentaires sur « Le club des Irrésistibles : un bel exemple de médiation globale à Montréal »

    1. Une commauté de pratique rassemble des personnes ayant les même pratiques professionnelles. Les bibliothécaires qui recommandent et font des acquisitions sont une communauté de pratique. Une communauté d’intérêt rassemble des personnes qui partagent les même centres d’intérêt

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  1. Merci pour l’ensemble de votre commentaire, notre animatrice est vraiment passionnée et totalement irremplaçable. Nous lui souhaitons longue vie.
    Par contre, je ne vois pas en quoi cela bonifierait la critique, d’en savoir le prénom de l’auteur. Généralement les clubs font partie d’une bibliothèque de quartier et sont composés d’une douzaine de personnes. Le fait de mentionner le nom et l’endroit du club et non pas le prénom permet d’écrire la critique en toute liberté, même si elle va totalement à contre-courant.
    À part d’apporter une petite « gloire » à son auteur, ça ne dirait absolument rien aux personnes qui la lisent aux quatre coins du globe de savoir son prénom, d’autant qu’il peut bien y avoir plusieurs personnes qui portent le même prénom dans un club donné.
    C’est un cas où selon moi l’anonymat est bien utilisé.

    Membre du club de Saint-Dorothée

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    1. Moi aussi je crois que l’anonymat permet d’émettre des commentaires en toute liberté sans peur d’être jugé par ses pairs.

      Membre du club de Pointe-Claire

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