Lors de mes interventions, j’ essaie  toujours de trouver un moment pour visiter la bibliothèque de la ville qui m’accueille. Et ces dernières semaines je fus frappé de constater que tous ces équipements, sans exception, proposés à leurs usagers une bibliographie ou un présentoir dédié au dernier prix Nobel de Littérature, à savoir Le Clézio. Ma propre bibliothèque n’a pas échappé à la chose.
Il est tout  à fait normal que les bibliothécaires rebondissent sur l’actualité et tentent de mettre en avant leur collection sur cet événement. Ce qui m’a étonné, c’est de trouver la même offre dans six bibliothèques éparpillées sur le territoire et sans se concerter.  J’y vois la manifestation du manque d’imagination des bibliothécaires. Honnêtement, je pense que tous nos usagers nous attendaient au tournant sur Le Clézio.  Je le concède, il était très difficile d’y passer à côté. Mais qui n’a pas fait ses recommandations documentaires sur les dernières élections américaines ?

Allons plus loin. Quelque chose me dit que certains de nos usagers pensent que faire une bibliographie de Le Clézio ça ne  doit pas être bien difficile. Ben alors, à quoi il sert le bibliothécaire ?

Mais proposer une bibliographie sur « la rupture » – qualificatif attribué à l’œuvre de Le Clézio par l’académie Nobel – .. là ça change tout.  Car  nous surprenons l’usager.  Cette offre décalée réveille son intérêt, sa curiosité.  Cela valorise aussi notre expertise.  Car seul le professionnel – ok j’exagère – peut élaborer une sélection » sur des thèmes comme « la couleur bleu », « le doute », « lutter contre ses mauvais démons » … Il ne s’agit pas seulement de donner une simple liste thématique de titres . Il y a une référence aux propos des documents. Les œuvres sont mis en perspective.  il y a des connexions – improbables –  entre les documents. « Les mauvais démons » dans les romans, les polars, la BD, les DVD, les photos de l’artothèque, le web … Nous mettons de la cohérence à notre offre documentaire.

Surprenons donc nos usagers. Offrons leur, encore une fois, des éxpériences originales, des voyages inattendus à travers nos collections. Et pas simplement qu’avec une bibliographie. Des cartes en ligne, des timelines, ou encore une photographie point de départ de recommandations de lecture, d’écoute … Comme le dit si bien Calenge dans son dernier livre, soyons des faiseurs de chemin.

6 commentaires sur « Surprenons nos usagers »

  1. Quel usager ? Comme si celui-ci était un monolithe. Or, les usagers sont multiples et leurs usages sont multiples. Il y a le flanneur, celui qui vient rarement. Celui qui est toujours là et fréquente toujours les 3 mêmes rayons qu’il connait sur le bout des doigts (« mais c’est toujours les mêmes livres chouchous au rayon jeunesse ! »). Celui qui va être heureux de trouver la sélection de livre sur l’Amérique ou sur le dernier prix Nobel, car c’est ce qu’il venait chercher et celui qui va trouver cela racoleur alors que vous auriez pu mettre en avant un livre sur la construction durable parce qu’il revient d’un salon sur le sujet ou sur Beckett parce qu’il y a une pièce de Beckett joué en ce moment au théâtre de la ville…

    Plein de gens ne veulent pas forcément être surpris, mais seulement satisfaits. Or, on ne peut surprendre ou satisfaire que qui on connait.

    Moi ce que j’aime, c’est quand un bibliothécaire vient vers moi et me dit, tiens regarde ce livre pour tes enfants. Ou tiens, prend cette BD. Ou tiens, on vient de recevoir tel livre sur les nouvelles technos ou sur la politique qui devrait te plaire. Ou « tient, tu as lu le livre d’André Gunthert ? On l’a reçu, jette un oeil dessus. »

    Un moteur de recommandation humain quoi. ;-).

    PS : faut que j’arrête de commenter sous tous les billets ici, ça fait vraiment troll de base.

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  2. @ hubert > quelle vision réductrice de l’usager ! Il ne demande qu’à être satisfait, comme si notre travail se résumait qu’à satisfaire une demande. Et bien non, notre travail est aussi de surprendre, de proposer des connexions entre les documents. Notre travail est d’essayer de faire mieux connaître notre fonds à nos usagers. Susciter la découverte, la curiosité.

    Hors de question d’accepter l’idée que nos usagers peuvent se contenter de trois rayons, ou que d’un seul genre, même si c’est une réalité. Mon idée est d’utiliser ces portes d’entrées pour proposer autre choses. Une proposition que l’usager jugera bon ou pas de suivre. Sans négliger sa satisfaction bien entendu ….

    La suggestion verbale est effectivement l’idéal. Mais nous n’avons pas les moyens humains de le faire de manière globale. Du coup ce procédé ne profitent bien souvent qu’à l’habitué bien identifié.

    Finalement je trouvais que les bibliothécaires manquaient d’imagination …. les usagers confirmés font preuve d’un conservatisme étonnant !

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  3. Non, tu m’as mal compris. J’adore être surpris. Tout le monde ne le souhaite pas. That’s all. Mais oui, c’est bien votre métier.

    Et beaucoup de gens seront surpris même de voir Le Clezio en devanture dans leur bibliothéque, quand ils pensaient être les seuls à avoir l’idée d’aller le chercher. ;-).

    La suggestion verbale ;-). Si elle serait possible même pour un usager qu’on ne connait pas. Imagine. J’arrive à la bibliothèque. Quand ma carte passe le détecteur Rfid, je suis reconnu et identifié. Un programme scanne mes derniers emprunts. Regarde ma whislist Amazon, mes dernières recommandations sur mon Google Reader… Et les compare par exemple aux dernières acquisitions. Un humain regarde les suggestions du programme pour venir m’en proposer une. Directement.

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  4. @Hubert > ok …. c’est bien pour cela que la médiation en bibliothèque est multiple afin de satisfaire tout le monde ….. la boucle est bouclée ! 😉

    Sur la RFID …. il suffit de lire les débats sur cette question dans biblio.fr pour comprendre que ce n’est pas encore gagné.
    Scanner Wishlist Amazon, google reader ….. « I have a dream » disait il …

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